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La vie de l’église est fondée sur la « parole du Seigneur » en tant qu’elle est le vestibule et le fondement de la foi. Sa mission aussi est fondée sur la même parole de Dieu. L’Exhortation Apostolique Post-Synodale de Benoit XVI, intitulée « Verdum Domini », publiée le 30 septembre 2010, au moment où le Saint-Père clôturait, pour l’église universelle, la XIIème Assemblée Générale du Synode des Evêques affirme avec force l’importance de la parole de Dieu dans l’Eglise.

Ce texte magistériel fait suite, à bien y regarder, à la constitution dogmatique « Dei Verbum » du Concile Vatican II sur la Révélation divine, dont le 5ème anniversaire de l’adoption sera célébré aussi en Novembre 2015. en nous employant à vulgariser et à lire en profondeur l’Exhortation Apostolique post-synodale « Verbum Domini », nous avons le sentiment de mieux servir à faire connaître et aimer les Ecritures où le peuple de Dieu entend la Parole de son Seigneur et où tous les hommes sont appelés à trouver le sens de leur vie, qu’en redécouvrant l’enseignement normatif de « Dei Verbum » en matière d’interprétation des textes pour une bonne appropriation du message que Dieu nous adresse quand nous lisons la bible.

 

Etudier et comprendre la Constitution « Dei Verbum », c’est donc bien appréhender le message chrétien du salut annoncé par l’église et éviter des interprétations erronées qui s’éloignent de la vitalisation de la tradition et de l’écriture, c’est-à-dire, de l’enseignement divin.

Nous entendons ici donner une brève présentation de la Constitution dogmatique « Dei Verbum » avant de découvrir que pour ce qui touche à la foi, l’Eglise ne tire pas de la seule Ecriture Sainte sa certitude sur tous les points de la Révélation, sans omettre de préciser la vérité des écritures pour notre salut.

Nous pourrons dès lors nous intéresser aux problèmes d’interprétation dans la mesure où la Bible est Parole de Dieu, en langue humaines. Elle est porteuse du mystère et tout ce qui concerne la manière d’interpréter ses textes est soumise en dernier lieu au jugement de l’Eglise, qui s’acquitte de l’ordre et du ministère divin de garder et d’interpréter la parole de Dieu 1.

1- Brève présentation de « Dei Verbum »

La constitution dogmatique «de Divina Revelatione » (Dei Verbum » est promulguée le 18 décembre 1965. le plan du texte français de ladite constitution présente un avant propos suivi de six chapitres : chapitre 1 : la révélation elle-même ; chapitre 2 : la transmission de la révélation divine ; chapitre 3 : L’inspiration divine de la Sainte Ecriture et son interprétation ; chapitre 4 : L’ancien Testament ; Chapitre 5 : Le Nouveau Testament ; Chapitre 6 : La Sainte Ecriture dans la vie

Quel dans le latin tardif, a été pris pour un féminin singulier. D’où la forme qu’il reçoit dans notre langue ; d’où aussi la portée que nous lui donnons : la Bible est pour nous le livre par excellence.

Plus qu’un livre, la Bible est une bibliothèque. On y trouve en effet un certain nombre d’ouvrages très différents les uns des autres, regroupés en deux grands ensembles : l’ancien et le Nouveau Testaments (en abrégé : AT et NT). Le mot « Testament» est l’une des traductions possibles du grec « diabète ». Il met en relief un des traits fondamentaux de la révélation, celui de l’alliance ou traité que Dieu fit avec son peuple, le peuple d’Israël. – Ce traité-en hébreu « berith »- fut renouvelé plus d’une fois. Il revêtait la forme d’un contrat, car le peuple, de son côté, acceptait certaines conditions, celle en particulier, d’être fidèle au Dieu unique, au vrai Dieu. Le mot « testament » est un décalque du mot latin « testamentum » qui traduit le mot hébreu «berith» désignant l’alliance.

La bible, c’est donc l’ensemble des livres qui nous parlent de l’alliance que Dieu a faite avec Israël par l’intermédiaire de Moise (ancienne alliance) et qu’il a accomplie en Jésus-Christ (nouvelle alliance)

La bible est la Parole de Dieu mise par écrit ; il peut donc y avoir une parole de Dieu qui n’est pas écrite.

Les Luthériens affirment que l’Ecriture seule est Révélation pour les chrétiens, la Parole divinement écrite, la Sainte Ecriture épuise le donné révélé ; ils pouvaient ainsi s’évader de l’autorité de la Tradition catholique et de son Magistère.

Les manuels de théologie catholique eux, enseignent que l’Ecriture et la tradition sont toutes deux sources de notre foi. C’est la Tradition toujours vivante dans l’Eglise qui nous a transmis les écritures. Le discernement des livres saints est un fondamental de la tradition infaillible, dans l’Eglise, de la parole de Dieu. Orale ou écrite, est toujours confiée à des hommes qui l’accueillent, l’annoncent et la transmettent : « l’Ecriture est, par excellence, l’objet de la Tradition ».

La tradition se prolonge donc, vivante, à travers les siècles de l’Eglise ; et elle se nourrit de l’Ecriture en même temps qu’elle la porte. Les deux restent donc, dans l’Eglise et dans le monde, aussi vivantes que Jésus-Christ. Elles ne sont, en effet, rien d’autre que le Verbe, Parole de Dieu Dei Verbum ; incarné, ressuscité, répandu et communiqué. L’Eglise est donc toujours en train de lire l’Ecriture et de proclamer la Tradition. C’est d’ailleurs tout un. Elle proclame solennellement la Parole dans la méditation personnelle des croyants. Elle la partage, comme le pain, le pain de la Parole, dans ses groupes de ressourcement. Elle la questionne et invoque son autorité pour éclairer et trancher les problèmes du jour. La tradition Sainte, écrite ou orale, c’est toujours une puissance d’appel qui fait autorité dans l’Eglise et qui n’est autre que Jésus-Christ.

Des méprises et des conceptions erronées de la tradition de l’Eglise peuvent faire éclater des divisions et des oppositions au sein de l’église. C’est pourquoi, l’église tient pour acquis l’enseignement selon lequel il y a de la tradition orale ou écrite, c’est le pape en communion avec l’ensemble des évêques, c’est l’ensemble des évêques en communion avec le pape. Ce qu’on a appelé, d’un terme récent, « le Magistère » ; mais la réalité est plus ancienne : le Magistère des évêques et du pape fait partie de la partie de la tradition et des écritures saintes. «La charge d’interpréter de façon authentique la parole de Dieu, écrite ou transmise, a été confiée au seul Magistère vivant de l’Eglise dont l’autorité s’exerce au nom de Jésus-Christ » (DV n°10)

Cependant, le Concile distingue bien le rôle des évêques de celui des Apôtres dans ce ministère de la Tradition vivante.

Les Apôtres ont reçu directement la parole de Dieu, c’est eux qui ont formé la tradition et fixé les écritures. Ils ont transmis intégralement la Révélation divine à leurs successeurs. Ce rôle est terminé avec la mort du dernier d’entre eux. Les évêques, eux, illuminés par l’Esprit de vérité, ont mission de grâce pour garder la Révélation, l’expliquer et la répandre avec fidélité.

Pape et évêques ont à se soumettre, eux aussi, à l’écriture et à la tradition et ne sont infaillibles que dans cette soumission :

«Ce Magistère n’est pas au-dessus de la parole de Dieu, mais il la sert, n’enseignant que ce qui fut transmis, puisque, par mandat de Dieu, avec l’assistance de l’Esprit Saint, il écoute cette parole avec amour, la grande saintement, l’expose avec fidélité, et puise en cet unique dépôt de la foi tout ce qu’il propose à croire comme étant révélé par Dieu » (DV N° 10).

Pour ce qui touche la foi, Ecriture ou Magistère ne parlent jamais seuls. Il n’y a de dogme de foi que quand elles parlent les trois ensembles. Personne ne peut prêcher ou enseigner en se coupant de l’Ecriture. Pas plus qu’on ne peut lire ou interpréter l’écriture en se coupant de l’Eglise, c’est-à-dire de la tradition vivante. Voici la règle d’or : « il est donc clair que la Sainte Tradition, la Sainte Ecriture et le Magistère de l’Eglise, par une très sage disposition de Dieu, sont tellement reliés et solidaires entre eux qu’aucune de ces réalités ne subsiste sans les autres, et que toute ensemble, chacune à sa façon, sous l’action du seul Esprit Saint, contribuent efficacement au salut des âmes » (DV n°10°

La révélation divine est close, mais vivante et inépuisable. La Constitution dogmatique sur l’Eglise précise à ce niveau : « Le Pontife romain et les évêques s’appliquent avec zèle à scruter consciencieusement et énoncer correctement la Révélation ; mais ils ne reçoivent, comme appartenant au dépôt divin de la foi, aucune nouvelle révélation publique » (LG n(25)

Il est clair que les écritures nous révèlent Dieu, mais doit-on les interpréter à la lettre puisqu’elles sont inspirées ?

3- La vérité des écritures et le problème de leur interprétation

Il est convenu en église que les livres de l’Ecriture enseignent la vérité fermement, authentiquement, et sans erreur. Mais cette vérité des écritures reste à préciser : « Puisque toutes les assertions des auteurs inspirés, ou hagiographes, doivent être tenues pour assertions de l’Esprit Saint, il faut déclarer que les livres de l’Ecriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu, pour notre salut, a voulu voir consignée dans les lettres sacrées » (DV N°11). C’est ce que l’on a appelé l’inerrance biblique, c'est-à-dire le fait qu’elle n’enseigne pas d’erreur. La bible est une histoire sainte, c’est-à-dire que les événements, poèmes et récits sont choisis et rapportés dans la mesure où ils entrent dans le dessein de Dieu qui se joue à travers eux, et expriment le projet de salut. Là est la vérité des écritures : L’Amour sauveur de Dieu à l’Egard des hommes.

Il est évident que ces livres bibliques ne peuvent pas nous révéler les voies du salut sans toucher à de multiples domaines qu’étudient actuellement les sciences profanes : anthropologie et paléontologie humaines, et surtout l’histoire. Mais ils ne le font pas du même point de vue que les sciences profanes : ils se placent toujours au point de vue du dessein du Salut de Dieu. Ce qu’ils cherchent, ce qu’ils enseignent, ce n’est pas la représentation exacte du passé ; c’est l’interprétation de ce passé comme relation de salut entre Dieu et les hommes, en Jésus-Christ. Dans l’Ecriture Sainte, « la parole de vérité, c’est la Bonne Nouvelle de votre Salut » (Eph 1,13)

Le plan divin du salut s’est manifesté dans l’histoire d’un peuple qui l’a consigné par des Ecrits : «Les Saintes Ecritures ont le pouvoir de te communiquer la sagesse qui conduit au salut par la foi, qui est dans le Christ Jésus. Toute Ecriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, pour réfuter, pour redresser, pour éduquer dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli, équipé pour toute œuvre bonne » (2Tim. 3,15-16).

Des problèmes d’interprétation se posent cependant au lecteur de la Bible et aussi, à ses auditeurs, la Bible est Parole de Dieu porteuse du Mystère. Elle est écrite par des hommes d’un autre temps, d’un autre lieu, d’autres cultures, d’autres langues. Ces difficultés ont amené « Dei Verbum » à baliser son interprétation : « Puisque Dieu, dans la Sainte Ecriture, a parlé par des hommes à la manière des hommes, il faut que l’interprète de la Sainte Ecriture, pour voir clairement ce que Dieu lui-même a voulu nous communiquer, cherche avec attention ce que les hagiographes ont vraiment voulu dire, et ce qu’il a plu à Dieu de faire passer par leurs paroles » (DV n°12).

« Dei Verbum » nous invite à considérer, pour chaque auteur inspiré, les conditions de son temps, l’état, l’état de sa culture et surtout les genres littéraires alors en usage, pour bien interpréter ses textes : « il faut en conséquence que l’interprète cherche le sens que l’hagiographe, en des circonstances déterminées, dans les conditions de son temps et l’état de sa culture, employant les genres littéraires alors en usage, entendait exprimer » (DV n°12).

Et ces conditionnements varient d’un auteur à l’autre : Pour vraiment découvrir ce que l’auteur sacré a voulu affirmer par écrit, on doit tenir un compte exact soit des manières natives de sentir, de parler ou de raconter courantes au temps de l’hagiographe, soit de celles qu’on utilisait à cette époque dans les rapports humains » (DV n°12)

L’histoire y a donc sa grande part, même si tout récit biblique n’est pas de l’histoire : la Révélation de Dieu et son amour nous vient aussi à travers les contes, les proverbes et les paraboles. Et c’est le même Esprit Saint qui a parlé à ces hommes et « La Sainte Ecriture doit être lue et interprétée à la lumière du même Esprit qui la fit rédiger » (DV n°12).

Toute bonne interprétation des écritures doit donc tenir compte des genres littéraires qui varient, de la part de l’histoire, de la tradition vivante et de l’analogie de la foi, pour donner un sens exacte de la parole de Dieu. Toutefois, dans la mesure de ses moyens, chacun doit s’appliquer à découvrir la Bible comme une lettre d’amour, l’amour de Dieu pour les homes qu’il sauve.

4- Conclusion

La constitution dogmatique « Dei Verbum » sur la Révélation divine nous fait découvrir que Dieu a pour dessein de racheter l’humanité. Ce dessein devait s’accomplir par la mission dans le monde de son fils unique. La venue du Fils de Dieu a marqué le début d’une nouvelle ère.

La manière concrète, essentielle, dont le terme «parole» est employé dans la Bible nous indique la voie à suivre pour bien interpréter et comprendre, dans son contexte, la notion de « révélation ». La bible n’est pas une somme de vérité » abstraite, un corps de doctrine. Ce que l’écriture révèle, c’est Dieu lui-même, c’est-à-dire un être vivant et personnel : le Créateur qui gouverne le monde (Is 45,12) le Saint qui convie les hommes à un service d’amour (Ex 20,1ss ; 34,6 ; Os 11,1ss), le Maître de l’histoire qui dirige temps et événement vers un but de salut (ex 14, 8 ; Am 2,9-10 ; Jr 32,20 ; Is 45, 1ss ; 52,10).

Dieu se révèle lui-même par ses interventions dans la vie des individus et dans celle de la nation toute entière. Et dans la pleine révélation du Nouveau Testament, ce que Jésus fait connaître n’est pas un système qu’il importait de bien saisir, mais une voie qu’il faut suivre. Il parle, mais sa personne et ses actions parlent plus haut que sa parole, la « parole du Seigneur » «Verbum Domini » et son message est un message de salut.

Toute l’Eglise est donc invitée à lire les Ecritures comme message de salut. Aux prêtres et aux clercs, aux diacres et aux catéchistes, «Dei Verbum» en recommande « une lecture spirituelle assidue et une étude approfondie », afin qu’ils parlent au dehors du trop plein de leurs cœur. Mais aussi, « de façon insistante et spéciale, à tous les chrétiens », afin qu’ils connaissent Jésus-Christ. Car «  ignorer les Ecritures, c’est ignorer Jésus-Christ » (DV n°25).

Le chapitre 6 et dernier de notre constitution nous rappelle enfin de compte que le mystère eucharistique et la parole de Dieu sont les deux présentations du même pain de vie : « L’Eglise a toujours vénéré les divines Ecritures, comme elle l’a toujours fait aussi pour le corps même du Seigneur, elle qui ne cesse pas, surtout dans la Sainte Liturgie, de prendre le pain de vie sur la table de la Parole de Dieu et sur celle du Corps du Christ, pour l’offrir aux fidèles » (DV n°21)

Nous en arrivons donc à conclure notre étude par cette adresse de « Dei Verbum » à l’endroit de nous qui planifions la théologie : prédicateur, catéchistes, catéchètes, professeurs d théologie, théologiens de métier : l’écriture, voilà le lieu, la racine, la source et l’âme de la théologie et de toute catéchèse. Le dogme doit être lu dans l’écriture, interprété selon l’Ecriture, surtout nourrit d’écriture :

«Il faut donc que toute la prédication ecclésiastique, comme la religion chrétienne elle-même, soit nourri et régie par la Sainte Ecriture. Dans les Saints Livres, en effet, le Père qui est aux cieux vient avec tendresse au-devant de ses fils et entre conversation avec eux ; or la force et la puissance que recèle la Parole de Dieu sont si grandes qu’elles constituent, pour l’Eglise, son point d’appui et sa vigueur et, pour les enfants de l’église, la force de leur foi, la nourriture de leur âme, la source pure et permanente de vie spirituelle » (DV n°21).

Abbé Dieudonné Désiré Ondoa AMBELA

Prêtre


BIBLIOGRAPHIE

I- Sources

- La bible de Jérusalem, Paris, Cerf, 1973 (Nouvelle édition)

- La bible TOB, Alliance Biblique universelle – Le Cerf, Paris, 1996

- La Sainte Bible, Alliance Biblique Universelle-Le Cerf, Paris, 1996.

- Vatican II, les seize documents conciliaires textes integral, Fides, Montréal et Paris, 1967.

II- Dictionnaire

- Mckenzie J.L, Dictionnary of the Bible, Londres, 1965.

- Vocabulaire de théologie biblique, Paris, 1962

- Léon –Dufour, X, et collab., Vocabulaire de théologie biblique, nouvelle Edition, Cerf, Paris,

III- Ouvrage généraux

- Harrington W., Nouvelle introduction à la Bible, Seuil, Paris, 1990

- Charpentier E. Pour lire l’Ancien et le Nouveau Testamen, Cerf/ Verbum Bible, Paris, 1990.

- Rey-Mermer th., Croire. Vivre la foi avec le Concile Vatican II, Droguet et Aedaut, Limoges, 1981.

IV- Articles :

- Benoit P. « Révélation et Inspiration », dans concilium, 10 n°1, 1965, p.13-26.

- Congar Y., « le Christ dans l’économie salutaire et dans nos traités dogmatiques », dans Concilium, 11, 1965, p.12

- Robert A., « Logos », dans Dictionnaire de la Bible Supplément, V, Letouzey et Ané, Paris 1928 et ss.

 

 

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