09
Jan 2012
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Eminence Christian Cardinal TUMI,

Excellences Nosseigneurs les Evêques de la Conférence Episcopale Nationale,

Chers confrères dans le sacerdoce,

Révérendes Sœurs,

Chers fidèles du Christ,

Hier nous avons célébré l’Epiphanie du Seigneur, autant la naissance de Jésus a connu un retentissement limité (quelques bergers et des anges), autant l’épiphanie fait éclater les frontières de la Palestine pour atteindre les païens qui viennent adorer le vrai roi de l’univers en lui apportant des présents.

 

Quant au baptême que nous célébrons en ce jour, je voudrais tout d’abord relever deux aspects liés à l’événement rapporté par Marc. Le monde palestinien comme la plupart de nos cultures, avait des rites de purification pour éloigner le mal ou la souillure du péché. Le baptême de Jean-Baptiste va au-delà de cette vision matérialiste de la purification, parce qu’il intègre la conversion d’une part, d’autre part pour se baptiser on a besoin d’un autre. Il y a là un acte d’humilité et même de soumission à une volonté plus grande « Jean proclamait un baptême de conversion pour le pardon des péchés » (Mc 1, 4). Il ne s’agit pas seulement de se purifier, de se laver mais de se convertir. « Que le méchant abandonne son chemin, et l’homme pervers ses pensées ! Qu’il revienne vers le Seigneur, qui aura pitié de lui, vers notre Dieu qui est riche en pardon » (Is 55, 7). Telle la conversion selon le prophète Isaïe (1ère lecture). Il s’agit autrement dit de changer de vie, de vivre nouvellement en relation avec Dieu en recevant son pardon. L’esprit du prophète Isaïe se retrouve donc dans l’action de Jean au bord du Jourdain. Dans le cas de Jésus, « Jésus se fit [donc] baptisé par Jean dans le Jourdain » (Mc 1, 9) nous dit l’évangile de ce jour. Et pourquoi donc ? Est-il nécessaire à Jésus de se faire baptiser ? Il est pourtant « plus puissant » que Jean, il n’a pas besoin de se convertir, il est sans péché !

Oui, mais voilà, la logique du Christ n’est pas celle de Jean, la logique de Dieu n’est pas celle des hommes : « Mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins,  -déclare le Seigneur » (Is 55, 8).

Jésus n’accomplit pas ce rituel d’abord pour lui-même mais pour nous. Le baptême devient un signe pour nous, une manifestation de Dieu, une nouvelle épiphanie. En effet, aussitôt baptisé « Jésus vit le ciel se déchirer » : en sa personne, le monde de Dieu rejoint celui des hommes. C’est la manifestation de la kénose.

« Jésus vit [donc] le ciel se déchirer et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe. Du ciel, on entend une voix : « C’est toi mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis mon amour ». » (Mc 1, 10.11) Dieu se révèle ici comme Père, Fils et Esprit unis par l’amour. Le baptême de Jésus nous plonge dans le mystère trinitaire de Dieu. Du coup le Baptême de Jésus ouvre une nouvelle page de la connaissance de Dieu. Voilà qui rend le baptême de Jésus nécessaire. Il fallait dès le début de sa mission que les hommes sachent à quel titre Jésus par la suite prendra la parole. De plus, la voix qui se fait entendre nous demande d’accueillir le Bien-aimé de Dieu, celui en qui est concentré tout l’amour divin. Ainsi écouter Jésus, c’est écouter le Père céleste. C’est cette parole qui est relayée par l’Eglise à travers les Saintes Ecritures. Tant il est vrai que c’est en Dieu le Père que la parole prend source. (Verbum Domini n°20)

Bien-aimés de Dieu,

Ainsi Jésus est la parole de Dieu fait homme, pour qu’en l’écoutant nous devenions tous fils et filles de Dieu. Un baptisé ne peut pas avoir de plus grand titre que celui de fils de Dieu. C’est un titre dont nous devons être jaloux parce qu’il nous confère un statut privilégié. Un fils est un vis-à-vis du Père, en lui, le Père se reconnaît. Le baptême est aussi le moment de la parole donné. Parole de Dieu et parole de l’homme. Le texte d’Isaïe que nous avons écouté en première lecture le souligne fort bien : « La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, pour donner la semence au semeur et le pain à celui qui mange ; ainsi ma parole qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce que je veux, sans avoir accompli sa mission » (10-11).

Le texte souligne ainsi l’efficacité de la parole de Dieu qui porte toujours le fruit escompté, mais il souligne également la force de la parole tout court. La parole exprime celui qui la prononce, elle est la personne elle-même. Aussi dans certaines cultures du centre on dit : « l’homme se fait prendre par la bouche (entendons parole), et l’oiseau par les pattes ». Comme fils de Dieu, nous avons à manifester notre identité par le vécu quotidien de la parole de Dieu d’une part, d’autre part le respect de la parole donnée comme réponse d’amour de l’homme à Dieu.

Puisse le Seigneur nous aider à vivre chaque jour de sa parole.

Amen.