28
Mai 2012
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Écrit par Hélène

"Cessons de vilipender les autres, gratuitement et parfois méchamment", Homélie prononcée par Mgr Victor TONYE BAKOT le dimanche 23 mars 2008 à la Cathédrale Notre-Dame-des-Victoires de Yaoundé.

Chers frères et sœurs, bonne fête !


Le Seigneur est vraiment ressuscité, alléluia !

Cette nouvelle résonne sur l’univers depuis le matin de la première Pâques, Jésus est vraiment ressuscité ! Telle est notre foi, telle est la foi de tous les chrétiens depuis plus de 2000 ans aujourd’hui. Cette foi a bouleversé les cœurs, elle a embelli la face de la terre par des témoins et des témoignages sans nombre.

Jésus est sorti vainqueur de la mort. Il a renversé le mal et son père, satan. Jésus est revenu à la vie pour être le Seigneur des morts et des vivants. Jésus est maintenant Seigneur, à la gloire de Dieu le Père.

Cet événement est le plus grand que le monde ait jamais porté : Un événement inédit. Il dépasse l’entendement humain ; ce n’est pas pour autant qu’il est absurde. L’événement de la résurrection du Christ est la marque de la transcendance de Dieu, devant les calculs humains, il marque la suprématie de Jésus sur les puissances du mal. Il est source d’espérance. Le monde entier l’a expérimenté par la cohorte des hommes et des femmes qui ont cru.

Toutefois, de la résurrection, nous ne saurions avoir ni une représentation matérielle, ni un témoin : les soldats dormaient. Voici une histoire de larmes et de sang qui devient subitement une grande joie : Christ est ressuscité. Jésus était mort sur la croix après des heures de souffrance atroce.
Les apôtres brillaient par leur absence, sauf Jean qui avait persévéré près de la croix, avec la mère de Jésus. Au matin du troisième jour, seuls des signes parlent de ce qui est arrivé :

-    le tombeau vide,
-    la présence du linceul roulé à part,
- Les apparitions de Jésus ressuscité.

En dehors de ces signes, on dirait qu’il n’y a plus rien de matériel sauf les « témoignages des anges » :


« Soyez sans crainte. Je sais que vous cherchez Jésus le crucifié. Il n’est pas ici car il est ressuscité comme il l’avait dit ; venez et voyez l’endroit où il gisait. Puis vite, allez dire à ses disciples. Il est ressuscité des morts, et voici qu’il vous précède en Galilée » (Mt 28, 1-7)

En effet, au soir du vendredi, le corps de Jésus est détaché de la croix et remis à sa mère. Mais que faire du corps ? Dans leur panique et leur accablement total, les apôtres n’y avaient point pensé. Fort heureusement, Joseph d’Arimathie s’était fait tailler pour lui-même un tombeau dans le roc, que l’on pouvait fermer en roulant une lourde pierre. L’autorité juive avait pris des précautions : faire surveiller le tombeau par des soldats et faire sceller la pierre devant le tombeau pour éviter que ses disciples ne viennent le dérober et ne disent au peuple : « Il est ressuscité des morts ».

Or, malgré ces dispositions sécuritaires, Christ est ressuscité ; tel est le message de l’ange. Il est ressuscité, il n’est pas ici.  Une nuit  ou « le 3ème jour » après la déposition du corps dans le tombeau, l’Esprit de Dieu pénètre en Jésus et le métamorphose. Jésus reprend le chemin de la vie. Il reçoit de l’Esprit et du Père une impulsion, et en même temps, il reçoit de nouveau les pouvoirs dont il a joui « de toute éternité ». Jésus reçoit la souveraineté. Jésus ressuscité est maître du temps et de l’espace ; la mort elle-même n’a plus aucun pouvoir sur lui. On comprend pourquoi il refuse que Marie Madeleine le retienne en un lieu…(Cf. Jn 20,11). Le tombeau vide témoigne alors de la puissance de l’Esprit. Il souffle où il veut, quand il veut. Le tombeau vide n’est pas vide de la vie. Il est plein du souffle de la vie.
Même le corps du ressuscité est devenu immatériel. Il est immatériel pour l’action et en vue de l’action.

Ceux qui l’abordent le reconnaissent. Les disciples d’Emmaüs le reconnurent à la fraction du pain. Marie de Magdala le reconnaît à sa voix. Et Jésus agit, il est agissant.

Aussi Jésus apparaît-il aux disciples, alors que toutes les portes étaient verrouillées. Ceux-ci furent remplis de joie en voyant le Seigneur. Le corps du Christ ressuscité est un corps qui rassure quiconque le voit. Ce corps apaise ceux qui cherchent Dieu. Jésus ressuscité retourne vers le Père qui l’a commis depuis les origines et revient vers nous pour sauver et garder le peuple des croyants. Son corps et son esprit sont source de joie. Les apparitions dans ce contexte, ne sont pas des hallucinations. Elles sont des preuves que Jésus est vivant. Le tombeau vide aussi.

Désormais, l’échec apparent de la croix est une nouvelle victoire. Le tombeau vide sera le lieu d’un dialogue. Il sera le lieu d’une vérité à proclamer ou d’une contre-vérité à taire. Dans cette lutte, la vérité a vaincu.

Chers frères et sœurs,

La vérité vaincra encore et toujours, tant qu’il y aura dans le monde des hommes et des femmes qui vivent de l’Evangile, tant qu’il y aura au Cameroun des hommes et des femmes qui recherchent la paix, la vérité, la vie.


Il y a quelques semaines, la vie sociale de notre pays a connu une conjoncture morose. La hausse du prix du carburant a dégénéré en une vague de violence. Les hommes en ont perdu la vie ; d’autres ont vu partir en fumée le fruit de leurs efforts. La peur s’est installée dans les cités prenant en otage les acteurs dans tous les secteurs d’activités, autrement dit, paralysant la vie.

Heureusement, l’ordre est revenu dans le pays et nous devons en rendre grâce à Dieu. Le bon sens a pris le dessus. Comme dans la nuit pascale, la mort a cédé place à la vie. Il appartient désormais à chacun de porter la nouvelle aux autres. Il appartient à tout Camerounais de se dire à lui-même d’abord, plus jamais ça !

Plus jamais dans notre pays une misère qui dépouille l’être humain de sa dignité ;

Plus jamais dans notre pays une jeunesse abandonnée en grande partie à elle-même ;

Plus jamais dans notre pays une courbe de prix des produits de consommation en permanente ascension ;

Plus jamais dans notre pays un fossé toujours grandissant entre les pauvres et les nantis ;

Plus jamais dans notre pays des personnes âgées abandonnées à leur triste sort ;

Plus jamais dans notre pays la manipulation des consciences et des excitations à la violence et au vandalisme.

Plus jamais ça !!

Ce tableau malheureusement sombre, pourrait s’égayer si tous, nous décidons d’y apporter des touches colorées à la lumière de l’Evangile.


Chers frères et sœurs,


Le Christ ressuscité vient nous dire à quel point nous sommes tous concernés par le meilleur devenir de notre pays ; quels que soient notre statut social et notre confession religieuse, nous avons le devoir de promouvoir la vie.

L’esclavage n’est pas seulement chez les autres. Arrêtons de nous jeter la pierre et réfléchissons ; apprenons à nous entraider afin de parvenir ensemble à une vraie libération ; prenons la décision de construire notre pays, chacun à son niveau, prenons la ferme résolution de faire triompher la vérité.

Au sortir de la zone de turbulence, il nous appartient de porter la bonne nouvelle. Certes, cela n’est pas toujours évident, mais par la force de la Foi et de l’Esprit, nous y arriverons.

En son temps, Saint Paul n’ignorait pas les dangers de sa mission. Partout, il se heurta à des adversaires farouches, décidés à le faire taire. Sarcasmes, coups, lapidation, flagellation, prison : il a tout connu de la cruauté des hommes. Mais jusqu’au jour où, à Rome, il fut décapité, il ne cessa de proclamer la Bonne Nouvelle, d’appeler hommes et femmes, libres et esclaves, à croire, comme lui, à ce Jésus qui l’avait introduit dans l’épanouissement de l’amour, dans la lumière de la vérité.


Chers frères et sœurs,


Suite aux tristes événements de février dernier, de longues concertations entre le Gouvernement de notre pays et la société civile ont abouti à des décisions opportunes qui concourent à la paix et à la réconciliation. Ces initiatives sont à encourager. Sachons les accueillir positivement et même si beaucoup reste encore à faire, disons-nous qu’un pays ne saurait se construire en un jour !

La crise aura été pour tous, une occasion de prise de conscience. En choisissant le chemin de la paix, de la réconciliation, du respect des uns envers les autres, nous disons Oui à la vérité victorieuse de la Vie sur la mort. Tel est le message pascal pour nous aujourd’hui.

Aujourd’hui, plus que jamais, notre monde a besoin d’hommes et de femmes pour confesser le Christ Seigneur à l’instar des premiers martyrs de Rome qui déclaraient : « Non possumus » : nous ne pouvons pas plier le genou devant l’Empereur comme pour l’adorer.

Je voudrais que Pâques 2008 soit l’occasion de renouer définitivement avec la vérité du témoignage, à la suite des martyrs de Rome.

Sachons quitter résolument le monde du mensonge, de la duplicité, de l’hypocrisie, de la délation de la médisance et des calomnies.

Cessons de vilipender les autres, gratuitement et parfois méchamment,

Sachons maîtriser le petit animal qui est dans notre bouche : la langue. Une langue assassine qui tue gratuitement et cause tant de torts aux autres ;

Sachons être des hommes et des femmes francs : que notre Oui soit Oui et que notre Non soit Non : soyons des hommes de parole ;

Sachons dire la vérité mieux encore, sachons risquer la vérité ;

Sachons ouvrir notre bouche pour célébrer et magnifier Dieu par des cantiques de louange, pour confesser le Christ ressuscité en proclamant humblement : « Mon Seigneur et mon Dieu ».

En ce jour béni où notre Seigneur triomphe de la mort, puissent les fidèles du monde entier crier VIVE LA VIE !


Alléluia Christ est ressuscité !
Paix et joie dans vos familles !
Paix et joie dans notre pays et dans le monde !


Loué soit Jésus Christ !