Vivre son Effort de Carême oui, mais comment faire ?

HOMELIE DE LA MESSE DES CENDRES : MERCREDI 09 mars 2011 – 12H00

Textes liturgiques : Jl 2,12-18/Ps 50/2 Co 5, 20 – 6, 2/Mt 7, 21-27

Thème : Vivre son Effort de Carême oui, mais comment faire ?

Bien-aimés dans le Christ,

Nous sommes rassemblés ici ce jour, pour célébrer une chaleur de réconciliation, une chaleur d’amour, capable d’en contaminer d’autres.

Il faudrait donc, pour bien vivre le Carême : « tomber amoureux du Christ ». Si nous ne tombons pas amoureux du Christ et de l’Eglise, nous ne saurons bien vivre nos carêmes ou notre Carême.

L’Eglise nous invite à entrer avec foi et générosité en Carême afin que nous soyons vraiment ce que nous sommes fondamentalement depuis notre baptême, à savoir l’ « autre Christ », ou alors « alter Christi » ou des « christs en miniature ».

Le Carême est un temps favorable de retournement intérieur, de retour au Père comme l’enfant prodigue ; un temps de restructuration spirituelle, mentale, relationnelle, un temps où l’on s’engage à revenir résolument vers le Seigneur de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force, de tout son esprit. C’est ce mouvement que nous appelons « Conversion ».

Le temps de Carême est un temps fondamental de conversion, de convergence à la volonté de Dieu, de convergence au visage du Christ, de convergence à Jésus.

Et pour mieux vivre le Carême, il faudrait tout d’abord que nous nous reconnaissons tous pécheurs, vous et moi-même : nous avons tous péchés, et nous sommes à la recherche fidèle de ce salut perdu, de la grâce de Dieu qui nous manque assez.

Nous sommes tous pécheurs, et nous devons aller vers le Père d’un cœur humble, seule l’humilité nous de mieux rencontrer personnellement, inter-personnellement le Christ qui nous attend, et qui nous tend la main. Et plus l’attente se fera longue, plus sa soif de nous accueillir sera plus « ardente », et plus alors il faudrait que nous nous avancions pour le rencontrer, le toucher et accueillir la main qu’il nous tend.

Et saint Cyprien dans son enseignement fait l’écho de l’Evangile : Il nous rappelle que : « Dieu n’écoute pas nos voix, mais nos cœurs. Dieu écoute nos cœurs, il n’écoute pas nos voix. »

Et le prophète Joël dans la première lecture nous fait l’écho de l’oracle du Seigneur en ces termes :

« Revenez au Seigneur tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu. »

Bien-aimés dans le Christ, nous traînons, en effet, avec nous, un cortège de mauvaises habitudes et des vices.

Le pire de nos vices est notre état habituel de léthargie spirituelle, de médiocrité morale, de délabrement éthique. Nous nous reposons dans une moîte et tranquillisante tiédeur qui anesthésie en nous la vertu de force.

La peur ! La peur de nous faire mal, de nous engager, de nous séparer de certaines de nos aises, de renoncer à nous-mêmes, de mourir en un mot. De mourir à soi, de mourir à notre péché.

Tétanisés par cette peur, nous devenons incapables du moindre effort et avançons avec un art consommé de l’esquive tous les prétextes possibles qui cachent mal l’attachement indéfectible que nous nous portons !

D’un air benoît, nous nous excusons avec une facilité et une rapidité déconcertantes…alors que dans le même temps, pour des peccadilles, nous jugeons sévèrement et sans pitié notre prochain !

Il s’agit pour nous d’éradiquer cette peur en prenant des résolutions fermes de bâtir notre vie sur le roc, et le seul roc sur qui nous devons bâtir notre vie : c’est le Christ.

Hors du Christ, pas de paix !

Hors du Christ, pas de succès durable !

Hors du Christ, pas de joie !

Hors du Christ, c’est le délabrement moral et spirituel durable!

Revenons tous vers le Christ, l’épicentre et le centre de notre vie !

Hors du Christ, on connaîtrait de petits succès avec le marabout, le voyant, le féticheur, le devin, mais avec le Christ c’est le succès durable et total, parfois on passe par de petites épreuves, ces petites épreuves qui nous rendent sage, qui maturisent notre foi et notre relation au Christ.

Nous voulons, à présent, rappeler comment vivre ce Carême. Oui, on a besoin des efforts de Carême. Vivre son effort de Carême, oui, mais comment ?

Nous savons que le mouvement de conversion est un mouvement vital, donc imperceptible et lent, un meilleur effort de Carême est un temps de grâce.

Que devons-nous faire ? Question à la quelle chacun de nous peut répondre favorablement.

Au niveau individuel

Humain :

-         Respecter son corps, renoncer aux scarifications magiques, aux tatouages, à la cigarette, à l’alcoolisme, aux orgies, aux beuveries ;

-         Consacrer 15 minutes ou plus à ranger son bureau et sa chambre ;

-         Renoncer à se masturber.

Spirituel :

-         Vivre sa foi dans esprit de pur recueillement et d’offrande de soi à Dieu ;

-         Découvrir le sens de sa vraie vocation : le projet de Dieu sur nous ;

-         Retourner à Dieu de tout son cœur ;

-         Déchirer son cœur et non pas nos vêtements ;

-         Faire accomplir notre bonté humaine par la sainteté à travers une conversion du cœur ;

-         Faire bénir sa famille ;

-         Créer un coin de prière chez soi, en famille, voire au bureau ;

-         Demander, au Seigneur, dans la prière, la grâce de l’amitié ;

-         Participer à l’Adoration eucharistique tous les jeudis matin ou midi ;

-         Choisir au moins deux autres jours par semaine, en dehors du dimanche, pour participer à la messe : mardi et jeudi ou vendredi ;

-         Répondre aux sollicitations de la grâce sans tarder, lorsqu’elle nous appelle à être fidèle à notre devoir d’état ;

-         Nous astreindre à ramener tous les marabouts, les voyants, féticheurs, les devins à la vraie et pure foi chrétienne, à la messe ;

-         Arriver toujours à l’heure aux offices, au bureau ;

-         Eradiquer, barrer la route qui va chez les voyants, féticheurs, marabouts, si régulièrement consultés !!!

 

-         La garde du cœur :

• Rester en présence de Dieu : ne pas vivre le nez en l’air !
• Rester joyeux en toutes circonstances.

Relationnel :

-         Découvrir la force curative et libératrice du pardon ;

-         Rembourser ses dettes ;

-         Découvrir la beauté de l’amitié ;

-         Arriver à l’heure aux justes rendez-vous.

 

Au niveau paroissial

Entrer dans l’esprit du projet pastoral paroissial

Consolider, reconstruire, favoriser un lien familial durable

-         Ecouter les époux, les amener à dialoguer mieux ;

-         Former et accompagner les couples qui veulent se marier ;

-         Mieux gérer les contentieux entre les époux ;

-         Prier avec les couples et faire prier les couples (en famille…)

Animer et redynamiser les Jeunes (Jeunesse) en cette année du Synode Diocésain des Jeunes ;

Intensifier/améliorer/rendre performatif notre l’action caritative (Caritas) : veuves, orphelins, pauvres, enfants de la rue, « filles libres ».

Accompagner chaque groupe social et paroissial à travers des confessions, l’accompagnement spirituel, les retraites et les conférences spirituelles.

Au niveau familial

-         Poursuivre au quotidien et de manière pratique l’ « Eva’a mëtaè » : réconciliation, pardon, bénédiction des familles en vue du bien de tous ;

-         Prier ensemble en famille pour la paix et la prospérité des familles et la paix dans nos pays respectifs, particulièrement au Cameroun au moins tous les soirs ensemble ;

-         Centrer la vie familiale sur la méditation de la Parole de Dieu et l’Enseignement de l’Eglise (Curé, Evêque, Pape).

Au niveau professionnel

-         Saluer enfin ses collègues de la main, en esquissant un sourire sincère ;

-         Dépouiller nos bureaux de « gros serpents », de mythes, de totems, de poudres magiques, d’écorces à miracles ;

-         Vivre et garder pure sa foi des infestations ésotériques, sataniques, enténébrantes ;

-         Redécouvrir et témoigner d’une éthique de la responsabilité et de la correction fraternelle ;

-         Faire de nos lieux de services, des mini « facultés de pardon, de solidarité et de fraternité »… ;

-         « Booster » notre conscience professionnelle et la performance en stimulant tous à de bons résultats (en entreprise) ;

-         Donner les offrandes, la dîme pour la construction du presbytère « bis » et la réhabilitation de notre chère et belle Cathédrale « monument municipal » ;

-         Payer régulièrement et honnêtement un juste et honnête salaire à nos employés ;

-         Etablir un contrat en bonne et due forme avec nos employés ;

-         Affilier tous nos employés à la CNPS. (Assurer loyalement et honnêtement nos charges patronales).

Tous ces efforts (de Carême) nous ouvrent à la conversion.

La « profonde conversion » du Carême, affirme le Pape Benoît XVI, « c’est de nous laisser transformer par l’action de l’Esprit Saint, comme saint Paul sur le chemin de Damas ; mener fermement notre existence selon la volonté de Dieu ; nous libérer de notre égoïsme en dépassant l’instinct de domination des autres et en nous ouvrant à la charité du Christ ».

La période de Carême est un temps favorable pour reconnaître notre fragilité et notre état de pécheur. Un temps pour accueillir, à travers une sincère révision de vie, la grâce rénovatrice du Sacrement de Pénitence et marcher résolument vers le Christ.

Saint Pierre Chrysologue, pour éclairer notre approche des grands axes d’effort de Carême, nous rappelle ce qui suit :

«  Le jeûne est l’âme de la prière, la miséricorde est la vie du jeûne. Donc, celui qui jeûne doit avoir pitié ; il se fait entendre de Dieu, celui qui ne refuse pas d’entendre lorsqu’on le supplie n’est pas digne du Royaume ».

Que Marie, Notre Dame des Victoires intercède pour nous, afin qu’avec elle, nous vivions un Carême des meilleurs, un Carême dans l’humilité, un Carême dans le dépassement de soi, un Carême riche en espérance.

Que nos attentes ne soient pas vaines.

Seigneur nous t’en prions.

Louez soit Jésus-Christ.

 

Fait à Yaoundé le 09 mars 2011

Le Recteur,

Father Antoine Roger EVOUNA.