Homélie de la Solennité de la Fête-Dieu

Dimanche 26 juin 2011
Solennité de la Fête-Dieu
Homélie prononcée par Father Antoine Roger EVOUNA, Rector

Frères et sœurs dans la fraternité eucharistique,

Nous voici invités à reprendre conscience de ce qui se passe quand nous célébrons l’Eucharistie. Il s’agit d’un sacrement, c’est-à-dire de paroles et de gestes significatifs destinés à nous rendre présents à ce que Jésus a accompli en sa Pâque, en son passage de ce monde à son Père, emportant avec lui et faisant passer en Dieu notre vie actuelle et notre avenir. L’Eucharistie actualise tout cela. Eucharistie signifie "action de grâce ", c’est-à-dire acte de reconnaissance envers Dieu pour tout ce qu’il a fait pour nous, dans le Christ, et de tout ce qu’il fait au jour le jour. Le "Saint Sacrement " n’est pas d’abord les hosties que nous conservons dans nos tabernacles, mais notre participation à la reconstitution du dernier repas de Jésus. La "réserve " n’est là que pour permettre aux absents, en particulier aux malades, de participer à la célébration. Mais comment en vient-on à célébrer la Fête de ce jour ?

Fête-Dieu, Fête du Saint Sacrement, Fête de la Messe

Dans l'antiquité chrétienne en effet, on célébrait trois messes le jeudi saint, l'une pour la réconciliation des pénitents, une autre pour la consécration des saintes Huiles, et la troisième in Cœna Domini pour solenniser l'institution de la très sainte Eucharistie. Par la suite pourtant, une si grande splendeur de culte va diminuer avec le refroidissement de la ferveur des fidèles ; de là vient la nécessité d'une fête spéciale de la Sainte Eucharistie, surtout à cause des hérésies/fausses doctrines qui avaient surgi contre la vérité sur l’Eucharistie ; cette fête est instituée par Urbain IV en 1264 et étendue par Clément V à toute l'Eglise.

Le pape Jean XXII en 1318 a ordonné de porter l'eucharistie, le jour de la Fête du Saint sacrement (Fête Dieu),  en procession solennelle dans les rues et sur les chemins pour les sanctifier et les bénir. C'est à ce moment qu'apparaît l'ostensoir. Elle se répand dans tout l'occident aux 14° et 15°siècles. Le concile de Trente (1515-1563) approuve cette procession de la Fête Dieu  qui constitue une profession publique de foi en la présence
L'office du Très Saint Sacrement est un chef-d'œuvre de doctrine théologique, d'amour, de goût littéraire ; il a pour principal auteur Saint Thomas d'Aquin. La procession qui suit la messe devient généralement obligatoire au XVe siècle. ? Résumé du commentaire de cette messe par Dom Schuster, dans son œuvre L'année liturgique.

Cependant, pour mieux cerner ce mystère ineffable, mous devrions faire l’expérience du désert.

Dans le livre du Deutéronome (1ere lecture), Moïse décrit le désert comme « les solitudes remplies de hurlements sauvages ». Ce qu'il rappelle ici, c'est la sollicitude de Dieu pour son peuple au cœur même de ces épreuves. Plus que tout le reste, l'expérience la plus marquante du désert, c'est l'Alliance conclue au Sinaï. Et cette Alliance a été vécue au jour le jour dans des événements extrêmement concrets: « Souviens-toi de la longue marche que tu as faite pendant quarante années dans le désert ; le Seigneur ton Dieu te l'a imposée pour te faire connaître la pauvreté ; il voulait t'éprouver et savoir ce que tu as dans le cœur... »
Ces épreuves sont un lieu de vérité et d’expression de la pédagogie même de Dieu, de son éducation paternelle a l’endroit de son peuple.  Sinon le peuple serait mort à petit feu. Le peuple quant à lui va entrer dans une relation d’appartenance entière et d’abandon a Dieu.

L'Esprit Saint nous a été donné pour cela. Et la fête du Corps et du Sang du Christ nous rappelle que Jésus nous propose tout simplement d'habiter en nous. Et c’ est parce que le peuple se sent habite de son Dieu, qu’ il peut alors entonner par cœur ce refrain du psaume 147b que la liturgie nous propose aujourd’hui :
v.12 Glorifie le Seigneur, Jérusalem !
Célèbre ton Dieu, ô Sion
Il célèbre son Dieu pour les dons de la Création et la libération.
« Pas un peuple qu'il ait ainsi traité, nul autre n'a connu ses volontés ». « Volontés », c’est « Pardon » en langage de Dieu !

- En Exil, on a mangé le pain des larmes, le pain d'amertume ; le retour au pays, c'est le temps de l'abondance, c’est le pain de froment qui rassasie ; mais ne nous y trompons pas : cette abondance, c'est celle du rachat (comme dit le psaume 129). « Ceux qui sèment dans les larmes moissonnent en chantant » (Ps 125).
C’est  avec un cœur plein d’allégresse que Paul s’adresse aux fideles de Corinthe dans la deuxième Lecture (1 Co 10, 16 – 17)
Frères, écrit-il, 16 La coupe d'action de grâce que nous bénissons,  n'est-elle pas communion au sang du Christ ?
Le pain que nous rompons,  n'est-il pas communion au corps du Christ ?
17 puisqu'il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain.

Dans la religion chrétienne, en effet, on ne pratique pas de sacrifices d'animaux ; mais la religion juive en pratiquait et elle n'était pas la seule, les autres religions en faisaient autant ; et dans toutes les religions, que ce soit la religion juive ou une autre, le sacrifice était souvent suivi d'un repas qui avait lieu dans le temple même et au cours duquel on mangeait l'animal sacrifié, dans l'intention d'entrer en communion avec la divinité.
Et donc, parmi les Corinthiens fraîchement convertis au Christianisme, il y avait des gens qui jusqu'à leur conversion avaient participé aux sacrifices d'animaux de la religion grecque et aux repas qui suivaient ces cérémonies

Là Paul reste très ferme, il faut choisir : ou entrer en communion avec le Dieu vivant ou rechercher une autre communion. Il n'est pas question, dit-il, de participer à la fois à la table du Seigneur et à celle des idoles. l'Eucharistie nous fait entrer en communion avec le Dieu de Jésus- Christ. L'Eucharistie est donc repas de communion comme toutes les religions en connaissaient, mais c'est le sacrifice lui-même qui a changé : le sacrifice que Dieu attend, ce n'est pas l'égorgement d'un animal, c'est le don de nos vies
Et quand nous participons au repas de communion de l'Eucharistie, nous unissons nos vies à celle du Christ pour les offrir au Père.


Ainsi, sacrifier (faire du sacré) prend un nouveau sens : entrer en communion avec le Dieu de la vie, ce n'est pas tuer ; c'est vivre, et faire vivre nos frères en devenant leurs serviteurs.
La dernière conversion qui nous reste à faire, c'est de ne plus chercher à « faire » du sacré, mais à accueillir la Vie que Dieu nous donne.
Après avoir multiplié les pains, nous dit l’Évangile de Jean 6, 51-58, Jésus disait à la foule : 
51 « Moi, Je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement.

Le mot « chair » ici, dans la bouche de Jésus est équivalent de vie : nous pouvons donc lire « ma vie donnée pour que le monde ait la vie ». Et nous comprenons bien que Jésus fait allusion à sa Passion et à ce mystère ‘’Faites cela en mémoire de moi (Marie-Noëlle Thabut….)
L’Eucharistie n’est pas là pour nous donner la présence du Christ : il nous est présent de toute façon et de bien des manières, en particulier par les autres, même inconnus, qui viennent vers moi. Abrégeons : tout aboutit à la communion, ce partage du pain qui fait de nous, tous ensembles, le corps du Christ. Ainsi se trouve récapitulée toute notre relation à Dieu : la création et toute notre vie (le pain et le vin), l’œuvre pour laquelle le Verbe s’est fait chair avec son aboutissement : l’unité engendrée par le partage d’une humanité auparavant divisée par cette violence injuste que Jésus a assumée en s’y souvenant.
(Le commentaire des lectures bibliques par Marcel Domergue, jésuite, rédacteur, Cahiers Croire).


Tous ou presque avons fait l’expérience de notre Première Communion pour mieux témoigner de ce commerce d’amour en le Christ et nous, le pape aussi.

En effet, au cours d’une rencontre de catéchèse du pape Benoit XVI avec des enfants filles et garçons en 2005, voici comment le pape répond aux questions de deux des enfants candidats à la Première Communion.
Première enfant Andrea : Cher pape, quel souvenir gardez-vous en mémoire de votre Première Communion ?


Le pape répond : Je me souviens bien du jour de ma première communion. C’était un beau dimanche  de mars 1936. C’était un jour unique, l’Église était  belle, la musique aussi….Surtout au centre/cœur des plus beaux souvenirs et joies s’opère en moi une idée, je comprends que Jésus est entre en mon cœur, il est venu me visiter et avec Jésus, Dieu même est venu me visiter. C’est un don d’amour qui vaut  réellement plus que tout ce qu’on peut recevoir d’autre pour la vie. Et aussi, il se dégage réellement en moi une grande joie parce que Jésus est venu dans ma maison. Et j’ai alors compris  que je traversais une nouvelle étape de ma vie, j’avais 9 ans. J’avais fait une promesse au Seigneur à la mesure de mes possibilités : je demeurerai toujours avec lui et  je l’ai prie ainsi :


Mais, par delà tout,  reste avec moi, je tiens aussi a progresser dans ma vie. Merci à Dieu. Le Seigneur me prend toujours par la main, me guide aussi dans les situations difficiles.
Et aussi, cette joie de la Première Communion  allait devenir le début d’un chemin de progrès.
Chers fils et filles qui  tout a l’heure allez recevoir  le saint Corps du Christ, certains parmi vous ont 8 ans, 9 ans, 10 ans et plus, peu importe. Mais sachez une chose :    le Christ vous aime, il est la réponse a vos questions sur votre avenir, votre origine, du sens a donner a votre vie.
Aujourd’hui, il se fait votre meilleur ami, restez  lui toujours fideles.
Voici  la deuxième question, celle d’Alessandro :
« Ma catéchiste, en me préparant au jour de ma Première communion m’avait dit que Jésus était présent dans l’Eucharistie. Mais comment ? Je ne le vois pas !
« En effet, nous ne le voyons pas,  il ya beaucoup de choses que nous ne voyons pas, pourtant elles existent et sont essentielles. Par exemple, nous ne voyons pas notre raison,  pourtant nous avons la raison. Nous ne voyons pas notre intelligence pourtant nous l’avons. En un mot, nous ne voyons pas notre âme, pourtant elle  existe et nous voyons ses effets, parce que nous pouvons avoir, penser, décider etc. De même par exemple, nous ne voyons pas le courant électrique, pourtant, nous voyons qu’il existe, nous voyons que ce micro fonctionne, nous voyons la lumière. En un mot, il y a des choses plus profondes qui soutiennent réellement la vie du monde et que nous ne voyons pas, mais nous pouvons en sentir les effets. Car nous ne pouvons voir  le Seigneur ressuscite avec nos yeux, sans comprendre que c’est Jésus, les hommes changent et deviennent meilleurs. Il se crée une plus grande capacité de paix, de réconciliation etc. Nous ne voyons pas le Seigneur même, nous voyons cependant les effets : et la  nous pouvons comprendre que Jésus est présent. Allons donc a la rencontre de ce Seigneur invisible, mais confiants de ce qu’il nous aidera a bien vivre.

Ainsi donc aller à la messe chaque jour ou chaque dimanche et recevoir la Communion, c’est accepter de mettre Jésus au centre de ma vie, d’en faire la direction  véritablement unique de ma vie, le modèle de ma vie. »
Chers filles, chers fils qui recevez aujourd’hui la première Communion, n’ayez pas peur de vivre en chrétiens car vous l’êtes et c’est une grâce que d’ être chrétiens.
Qui sont au juste les chrétiens ? Ecoutons-en la sagesse qui nous vient de la Lettre a Diogène dans, Les chrétiens dans le monde :

Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par les coutumes. Car ils n'habitent pas de villes qui leur soient propres ; ils n'emploient pas quelque dialecte extraordinaire, leur genre de vie n'a rien de singulier. Leur doctrine n'a pas été découverte par l'imagination ou par les rêveries d'esprits inquiets ; ils ne se font pas, comme tant d'autres, les champions d'une doctrine d'origine humaine.

Ils sont dans la chair, mais ils ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur la terre, mais ils sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies, et leur manière de vivre est plus parfaite que les lois. Ils aiment tout le monde, et tout le monde les persécute. On ne les connaît pas, mais on les condamne ; on les tue et c'est ainsi qu'ils trouvent la vie. Ils sont pauvres et font beaucoup de riches. Ils manquent de tout et ils ont tout en abondance. On les méprise et, dans ce mépris, ils trouvent leur gloire. On les calomnie, et ils y trouvent leur justification. On les insulte, et ils bénissent. On les outrage, et ils honorent. Alors qu'ils font le bien, on les punit comme des malfaiteurs. Tandis qu'on les châtie, ils se réjouissent comme s'ils naissaient à la vie. Les Juifs leur font la guerre comme à des étrangers, et les Grecs les persécutent ; ceux qui les détestent ne peuvent pas dire la cause de leur hostilité.
Bien-aimés dans le Christ, Ce n’est pas toujours facile de devenir chrétiens. Écoutons plutôt les sages et savants de notre temps disent plutôt ce qui suit :

"Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas; c'est parce que nous n'osons pas les choses sont difficiles" Sénèque. La définition de l’impossible : quelque chose que personne ne peut faire jusqu’ au jour ou quelqu’un réussit à le faire.
Un grand bateau demande toujours de l’eau profonde. Tout progrès implique toujours un (capital) risque. Mère Teresa a averti, "À moins que la vie ne soit vécue pour d'autres, elle ne saurait être valable. Une vie égocentrique est totalement vide. Si vous êtes peu satisfaits de votre lot dans la vie, construisez-y une station-service. Une bonne façon d'oublier vos ennuis est d'aider d'autres à sortir des leurs.

A la fin des temps, la question ne sera pas : ‘’combien as-tu reçu/obtenu ?’’ Mais ‘’combien as-tu donné ? Non pas ‘’ combien as-tu gagné ?’’ Combien as-tu fait/réalisé ?’’ Non pas combien as-tu épargné ?’’ Mais ‘’ Combien as-tu sacrifié ?’’ Ce sera ‘’ Combien as-tu aimé et servi ?’’ Et non pas combien étais-tu honoré ?’’


W.E. Gladstone a observé, "l'Égoïsme est la malédiction la plus grande du genre humain". L'intérêt personnel est un feu qui consume d'autres et ensuite soi-même. Presque toute notre tristesse est le résultat de notre égoïsme. Il est absolument vrai que vous pouvez réussir le meilleur et le plus rapide en aidant d'autres à réussir.
La valeur d’une vie ne se mesure pas a sa  durée, mais dans la donation.
Chacun peut être grand parce que chacun peut servir. Peter MARSHALL p. 109.
J’ai la conviction selon laquelle l’une des marques d’une vraie grandeur consiste à développer la grandeur en d’autres :
Il y a trois clés qui ouvrent à une vie plus abondante : le souci pour les autres, risque pour les autres et le partage avec d'autres.
WILLIAM WARD

From John Mason, Believe you can: the power of a positive attitude, Spire ed., Illinois, 2004.pp 103-2036

Our Rule of Life:
We aspire to...   worship weekly - pray daily - learn constantly- serve joyfully - live generously.
(Lowell Grisham, Rector St. Paul's Episcopal Church Fayetteville, Arkansas)
Jean Paul II a placé Marie comme la « femme eucharistique » par son attitude intérieure.

De Cana à l'Eucharistie, la même foi, la même confiance nous est demandée.
De l'Annonciation à l'Eucharistie, le même « Amen » de la foi résonne.

Mère de Jésus, Marie est le premier tabernacle de l'histoire, et le Christ irradiait à travers le regard et la voix de Marie qui visitait Elisabeth.
- Merci à tous les fidèles de la Cathédrale.
- Merci à Marie Reine de l’Église pour le don d’un angélique ostensoir.
- Merci aux catéchistes qui deviennent grands parce qu’ils rendent grands les fils de Dieu.
- Merci aux ministres de la discipline (protocole).
- Merci aux enfants d’autels.
- Merci à mes confrères pour leur expertise pastorale et leur engagement sans réserve.
- Merci aux employés de la Cathédrale.

Puisse cette fête de la Sainte messe nous obtenir de faire de nos eucharisties une vie et de nos vies une eucharistie.

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